Départ de la Casamance
Parti quelques jour plus tôt de Ouloum en Casamance (Sénégal) l’alizé pousse Beg-Hir cap au 270° avec ses voiles chargées de poussières d’harmattant.
Les côtes Sénégalaises sont maintenant bien loin après 2 jours de mer dans un fort alizé. Beg-Hir se comporte bien avec un ris dans la grand voile. L’équipage vaque à ses occupations, nous ne sommes qu’à mi-chemin, aucune terre à l’horizon.
Le troisième jour de mer : une musique qui endiable l’équipage de Beg-Hir
Le troisième jour, alors que nous sommes encore bien loin d’arriver, nous captons sur les ondes courtes de la radio de la musique Cap-Verdienne ! Nous entendons chaque jour une musique très rythmée qui passe en boucle sur la radio. Nous sommes à la période des fêtes de fin d’année et ce tube Capverdien devient la musique préférée de l’équipage de Beg-Hir. Mais quel est donc ce morceau si entrainant ?
L’approche d’une île est toujours un moment magique. Après avoir été déconnecté de la terre, il arrive souvent que la reconnection se fasse au travers d’odeurs ou de petits insectes qui se posent sur le bateau, emporté par le vent, et ce sans même apercevoir encore la cote. On sent sa présence sans pouvoir la distinguer. Mais là, le Cap-Vert nous fait déjà rentrer dans son monde alors qu’il nous reste encore deux jours de mer ! Nous sommes en contact avec l’archipel sans pouvoir encore la voir ni la toucher.
Nous étudions un peu plus en détail les cartes et les instructions d’atterrissage :
« les positions relevées sont variables d’1,5 mille »
« La zone est mal hydrographiée, il peut y avoir la présence de hauts fonds »
Quant aux atterrissages de nuit, le livre des feux mentionne :
« Incertain … »
En 1983 le Cap Vert était loin d’être une priorité pour les services de cartographie …
Les jours suivant cet air de musique continu d’endiabler Beg-Hir et nous nous promettons une fois arrivé de trouver de quoi il s’agit !
Je vous laisse découvrir la suite de l’histoire en film avec des images d’archives que nous avons retrouvées …
En 1983 la musique capverdienne ne s’est pas encore exportée. Elle arrivera au niveau du grand public seulement en 1991 lors du festival d’angoulème avec Cesária Évora. C’est donc pour nous quelques chose de complètement atypique et inconnu.
Luis Morais et Cesária Évora
Luis Morais est une légende de la chanson Cap Verdienne. Au Cap-Vert il est même considéré comme le pape, bien plus que la futur « Reine de morna » ( Cesária Évora). Son tube, Boas Festas, est joué plus de 800 fois par jours pendant les périodes des fêtes de Noël.
Ami fidèle de Cesária Évora, il l’a accompagné régulièrement sur scène au tout début de sa carrière, lorsqu’elle chantait dans les bars au Cap-Vert. Les histoires des deux artistes sont intimement liées. C’est en effet Luis Morais qui est choisi comme directeur artistique du premier album que produit Cesária Évora en 1988 : « La Diva aux Pieds Nus ».
Luis Morais avait retrouvé Cesária Évora sur scène lors de la Nuit du Cap-Vert, le 28 avril 2001 au Zénith de Paris. Il avait rejoint ensuite le groupe de Cesária pour différents concerts, notamment lors des tournées américaines en juillet et en octobre 2001, ou encore lors de la tournée européenne de l’été 2002, année de sa disparition ( extraits de mindelo.info et de lusafrica.fr ).
Des débuts aux succès de Luis Morais
Né le 10 février 1935, à Mindelo sur l’île de São Vicente au Cap-Vert, Luis Morais a passé sa jeunesse à Dakar. Là, il y fait ses études et apprend le solfège et la composition. C’est à Dakar, dans les bals capverdiens, très prisés à l’époque, qu’il fait ses débuts sur scène comme clarinettiste et le saxophoniste.
Dans ces années d’après guerre, les rythmes latins (merengue, cha-cha, …) s’imposent dans le monde entier. A Dakar, le jeune musicien découvre ces rythmes avec passion. Il se met à arranger les standards capverdiens au goût du jour, et à composer. Morais s’attache à garder la forme traditionnelle de la coladera, mais il modifie sa structure rythmique en s’inspirant des rythmes cubains. La bonne société de Dakar est conquise, le terme coladera devient le nom même de la soirée où l’on joue cette musique endiablée. Après Luis Morais, la coladera capverdienne ne sera plus tout à fait pareille.
A la fin des années 50, avec d’autres musiciens capverdiens, il forme à Rotterdam, le groupe Voz de Cabo Verde, qui va être le premier ensemble musical à divulguer à l’étranger les rythmes capverdiens, mornas et coladeras. Pendant une dizaine d’années, Voz de Cabo Verde va enregistrer de nombreux disques, 33t. et 45t., pour le label Morabeza, également basé à Rotterdam…
Dans les années 60, il est l’un des premiers groupes à électrifier la coladeira.
Dans les années 60 et 70 le musicien partage sa vie entre le Cap-Vert et Lisbonne, où se concentre l’essentiel de la scène musicale capverdienne. A Lisbonne, Morais en devient l’un des acteurs principaux. Il forme les musiciens, notamment les frères Vieira, les frères Paris, et bien d’autres. Il arrange les titres pour certains, en compose pour d’autres, et surtout, il écrit les partitions, contribuant à fixer cette musique qui se transmettait surtout oralement jusqu’aux années 60.
Luis Morais enregistre de nombreux albums solo, mais surtout il est le compositeur de centaines de musiques, dont « Boas Festas », l’instrumental qu’il a composé en 1961, et qui est devenu depuis cette époque LE titre de fin d’année qui réunit les capverdiens du monde entier.
Il y a monté une école de musique pour transmettre sa passion aux nouvelles générations, mais c’est finalement aux Etats-Unis qu’il s’est éteint, le jour même de la fête de la musique au Cap Vert, 25 septembre 2002, à New Bedford, Massachusetts. Il avait 67 ans. Doçura (un label de Lusafrica) publiait son dernier enregistrement, l’album « Novidade de Mindelo », enregistré à Paris quelques mois auparavant.
La disparition de cette légende a été vécue comme un drame national et une foule énorme a bloqué les rues de Mindelo pour assister à son enterrement ( extraits de mindelo.info et de lusafrica.fr ).
Boas Festas
Au Cap-Vert, Boas Festas ( « Joyeuses Fêtes » ) est encore la chanson qui rythme les derniers jours de l’année, à la radio, comme dans les bars ou les tavernes. Où que l’on aille, quoi que l’on fasse à cette époque de l’année, on entend cette chanson « Boas Festas », dans sa version originale ou dans des versions modernisées. Son rythme gai et nostalgique à la fois met l’auditeur dans une sorte de joyeuse tristesse communicative. La perspective de la fête, de la Saint Sylvestre où l’on va tout oublier, donne envie de penser à l’ami, au frère, à l’être aimé, qui est parti pour toujours ou pour trouver, ailleurs, une vie meilleure… Car au Cap-Vert il y a toujours un temps pour pleurer et se souvenir, avant de rire et de chanter. ( extrait de : lusafrica.fr )
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Commentaires
3 Responses to “L’approche du Cap Vert”
J’aime beaucoup ce genre d’endroit, c’est splendide !
Merci Nathalie
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